(histoire – vingt lignes minimum) « ce monet est magnifique » Capucine sourit. Cet homme avait plutôt bon gout. Elle se tenait là, à coté de lui à observer une des plus grandes œuvres de Monet. « ce n’est qu’une reproduction, je peux vous obtenir le vrai si ça vous intéresse » plutôt bonne négociatrice, Capucine commençait à avoir l’habitude de ce genre d’homme qui venait observer les toiles et qui finissait souvent par repartir avec une. « j’ai vu beaucoup d’impressionnistes dans cette galerie, mais il en manque un, Degas, ces peintures ne vous plaisent pas ? » Elle hausse un sourcil, intriguée. C’était rare ce genre de personne, qui vient pour acheter une œuvre et qui sait de quoi il parle. En général, des personnalités envoyaient des acheteurs prêts à mettre des millions sur la table pour un tableau juste parce qu’il est « joli » sans saisir toute son histoire, sa signification. « Degas est certes un impressionniste, mais il est assez éloigné des codes liés à ce mouvement vous ne trouvez pas ? » Degas était un avant-gardiste, tout amateur d’art le savait. Mais ce n’était pas la raison pour laquelle on ne trouvait pas de reproductions de ses toiles ou même des originaux de ses toiles dans la galerie de la jeune femme. « Vous avez raison, en peignant des danseuses, il s’est fortement éloigné de ce mouvement » Les danseuses. Voilà la raison pour laquelle Capucine n’avait aucun Degas dans sa galerie. Elle refusait simplement de voir ce genre de peinture. Bien sur, elle les connaissait par cœur, mais les voir tous les jours, ça, elle en était bien incapable. C’était trop de souvenirs. De bons et de mauvais souvenirs. La danse avait fait partie de sa vie pendant un long moment. Si bien que maintenant qu’elle ne pouvait plus danser, elle ne supportait même plus la vue d’un tutu ou d’une paire de pointe. « Vous pensez pouvoir me trouvez la danseuse sur scène ? » Bonne question. Il ne pouvait pas demander un autre tableau ? Sérieusement ? Rien qu’à entendre ce nom, le tableau revint en mémoire à Capucine. Sa voix se fit un peu chevrotante rien qu’à ce souvenir. « Je.. Elle est au musée d’Orsay à Paris, le musée n’en ai pas propriétaire, mais je ne suis pas sure que cette toile soit à vendre » L’homme soupira. Bien sur que non, elle n’était pas à vendre. Et il le savait « Mademoiselle Hawkins, j’en sais suffisamment sur vous pour savoir que même si cette toile était à vendre, vous ne l’achèteriez pas, je me trompe ? » La jeune femme le regarda, intriguée. Puis ferma les yeux un instant, elle se sentit vaciller. Un vertige. Encore.  Machinalement, elle s’asseya sur la chaise la plus proche. Les vertiges, ça ne lui durait jamais longtemps, mais c’était toujours autant agaçant. Elle releva la tête vers l’homme, encore un peu vacillante. « Je… est ce qu’on se connait ?! » Elle n’avait pas vraiment la mémoire des visages, mais quand même. « Pas encore. Enfin, vous ne me connaissez pas, mais moi, j’ai vu toutes vos prestations au new york city ballet. Je suis Ezra Martin, le nouveau directeur du ballet » Elle se releva tant bien que mal. D’ordinaire, elle lui aurait serré la main, lui aurait dit qu’elle était ravie de le rencontrer, mais ce n’était pas le cas. « Qu’est ce que vous me voulez ? Je ne remettrais pas les pieds là bas » Jamais. Oh grand jamais. De toute façon, il lui était devenu impossible de danser, même une petite danse façon macarena ou madison, elle en était incapable tellement son oreille interne lui causait des soucis d’équilibre et de vertiges. « je voudrais vous proposer un poste de consultante, à mes cotés. Vous êtes une très grande danseuse, vous ne devriez pas gâcher votre talent dans cette petite galerie. Réfléchissez-y Capucine, si l’envie vous prend de renouer avec votre unique passion, vous savez où me trouver. » Et il tourna les talons, quittant par la même la galerie et ne laissant même pas le temps à la jeune femme de répondre. Chamboulée par ce qu’il venait de se passer, la blondinette décida à son tour de quitter la galerie et d’aller faire un tour au parc. Comme à son habitude, elle s’installa sur un banc et sorti son cahier à dessin, c'était sa façon a elle de penser à autre chose. En repensant à ce que le directeur du ballet venait de lui proposer, elle laissa échapper quelques larmes le long de ses joues. Qu’est ce que ce monde pouvait lui manquer.